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VIII

DERNIÈRES TENTATIVES

L’abbé et Grandville travaillaient à percer le mur, et y réussissaient en démolissant une ancienne fenêtre bouchée par la maçonnerie, lorsque tout à coup ils virent arriver deux nouveaux hôtes, dont l’un était le chevalier de Soulanges, homme sûr, que l’abbé de Bucquoy avait connu précédemment. Ils s’embrassèrent. Quant au quatrième, c’était une sorte de fou nommé Gringalet, que l’on soupçonnait d’être espion, car, dans les grandes chambrées, il y en avait toujours un. On parvint à lui rendre la vie si désagréable, qu’il voulut sortir, et fut remplacé par un autre.

Les quatre prisonniers, se reconnaissant pour des hommes d’honneur et de vrais frères, tinrent conseil sur les moyens de s’évader, et le plan proposé par l’abbé de Bucquoy obtint, dès l’abord, l’approbation générale.

Il s’agissait simplement de limer les grilles de la fenêtre et de descendre, la nuit, dans le fossé au moyen de cordes de fils et d’osier. L’abbé était parvenu à conserver quelques-unes de celles qu’il avait filées avec le baron de Peken, et instruisit ses compagnons à en faire d’autres, ainsi qu’à fondre des crampons.

Quant à la question de limer les barreaux, il fit voir une petite lime qu’il était parvenu à conserver et qui suffisait à tout le travail.

Seulement, ses précédentes traverses l’avaient rendu méfiant, et il voulut encore que chacun s’engageât, par les serments les plus forts, à ne point trahir les autres. Il écrivit des passages de l’Évangile avec une plume de paille et de la suie délayée, et fit jurer solennellement tous ses compagnons. Mais une difficulté s’éleva quant à l’endroit par lequel on attaquerait la contrescarpe, une fois dans le fossé.