Page:Nerval - Les Illuminés, Lévy, 1868.djvu/480

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« sur la malignité du beau sexe. » On trouve dans ce nouveau livre cette phrase :

« Ô femme ! l’extrait d’une côte ! fille de la nuit et du sommeil ! Adam dormait quand Dieu te fit… S’il eût été éveillé, peut-être aurait-on eu de meilleure besogne : ou bien il aurait prié le Seigneur de rendre l’os de ses os plus souple, du moins du côté de la tête.

« Adam aurait pu dire aussi à Dieu : « Laisse ma côte en repos ; j’aime mieux être seul qu’en mauvaise compagnie… »

L’abbé de Bucquoy avait trouvé un grand accueil à la cour de Hanovre, où on lui donna un logement dans le palais. Seulement, il ne s’attendait pas à y trouver une dame nommée Martha, qui était la concierge et qui le fit souffrir eu plusieurs occasions. Cette femme était fort avare, et tirait tout ce qu’elle pouvait de l’abbé.

Il était allé à Leipsick, et on lui avait envoyé de l’argent pendant son absence. En revenant, il n’entendit parler de rien ; mais une lettre l’avertit de ce qui lui était envoyé. Alors, il se plaignit, et la concierge lui répondit que, dans son absence, elle avait employé l’argent, mais qu’elle le lui rendrait plus tard. Il se borna à lui répondre en allemand : Es ist nicht recht. (Ce n’est pas bien.)

Cependant, comme il s’en était plaint au mari, elle vint chez l’abbé le matin, en chemise blanche et nu-jambes avec un cotillon fort court… « Que sait-on, dit l’abbé, si ce n’était pas une Phèdre furieuse d’amour et de rage… » C’est alors qu’il courut à ses pistolets « pour y mettre de la dragée. La dame eut soin de s’échapper très-vite… »

Ces dernières persécutions furent très-sensibles à l’abbé de Bucquoy, qui plusieurs fois s’en plaignit à Sa Majesté Britannique, de qui dépendait le gouvernement de Hanovre. On peut croire que, dans ses dernières années, c’est-à-dire vers quatre-vingt-dix ans, son esprit s’affaiblissait et l’amenait à s’exagérer bien des choses.