Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/338

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pait déjà sur ses hauts treillages, réjouissant l’œil comme les pampres d’Italie et promettant à ces contrées les faveurs du Bacchus du Nord. Des chevaux et des bœufs erraient en paix çà et là dans les pâturages, dont la lisière est brodée de beaux genêts d’or. — Voici enfin la flèche d’Anvers qui se dessine au-dessus des bouleaux et des ormes, et qui s’annonce de plus près encore avec son carillon monté éternellement sur des airs d’opéra-comique.

J’ai franchi bientôt les remparts, la place de Meer, la Place-Verte, pour gagner la cathédrale et y revoir mes Rubens : je ne trouvai qu’un mur blanc, c’est-à-dire rechampi de cette même peinture à la colle dont la Belgique abuse, — par le sentiment, il est vrai, d’une excessive propreté. « Où sont les Rubens ? dis-je au suisse. — Monsieur, on ne parle pas si haut pendant l’office. » Il y avait un office en effet. « Pardon ! repris-je en baissant la voix ; les deux Rubens, qu’en a-t-on fait ? — Ils sont à la restauration, » répondit le suisse avec fierté.

Ô malheur ! Non contents de restaurer leurs édifices, ils restaurent continuellement leurs tableaux. Notez que la même réponse m’avait été faite il y a dix ans dans le même lieu. J’ai songé alors avec émotion à ce qui s’était passé un peu avant cette époque au musée d’Anvers. L’histoire est encore bonne à répéter. On avait confié la direction du musée à un ancien peintre d’histoire, enthousiaste