Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/343

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bagages et les marquent d’un crayon blanc. Puisse-t-il nous porter bonheur comme la craie dont les Latins marquaient les jours heureux !

Il n’y a rien à tirer de cette mer bourbeuse côtoyée de berges vertes où apparaissent çà et là les grands bœufs de Paul Potter, que n’étonne plus le passage du steamboat, ni sa trace d’écume, ni son panache de fumée. Parfois le roulis nous apprend que nous tournons sur un bras de mer. Ailleurs, une branche de l’Escaut ou de la Meuse offre à la navigation des difficultés toujours vaincues. On frôle en passant ou l’on courbe des bois marins, de frêles genévriers qui s’amusent à verdir dans dix pieds d’eau, et qui secouent leurs panaches après notre passage comme des chats qui font leur toilette après avoir traversé un ruisseau. — Toujours sur les berges, souvent à peine perceptibles, des maisons peintes, des fabriques ou des moulins d’une carrure imposante, égratignant l’air de leurs grandes pattes d’araignées embarrassées dans les toiles ! La cloche annonce enfin Dordrecht, et nous passons si près des quais, que nous voyons très-bien les femmes dans leurs maisons de briques, nous inspectant à leur tour dans ses miroirs placés au dehors des fenêtres qui concilient leur curiosité naturelle avec leur réserve néerlandaise. — Puis nous n’avons plus à suivre qu’un fleuve paisible bordé de magnifiques pâturages à fleur d’eau que bornent au loin