Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/53

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seulement qu’il s’ennuyait en France. La conquête d’Alger a développé chez beaucoup de nos ouvriers le désir de connaître l’Orient ; mais on va à Constantinople par terre, et, pour se rendre à Alger, il faut payer le passage ; ceux donc qui ont de bonnes jambes préfèrent ce dernier voyage.

Je laissai mon compagnon s’arrêter à Schœndorf, et je continuai à marcher ; mais, à mesure que j’avançais, la nuit devenait plus noire, et une pluie fine ne tarda pas à tomber. Dans la crainte qu’elle ne devint plus grosse, et, malgré tout mon courage, je n’avais pas prévu ce désagrément, je résolus de m’arrêter au premier village, et de réclamer pour moi le tarif des compagnons, étudiants et autres piétons.

J’arrive enfin à une auberge d’une apparence fort médiocre et dont la salle était déjà remplie de voyageurs du même ordre de celui que j’avais rencontré ; les uns soupaient, les autres jouaient aux cartes. Je me mêle le plus possible à leur société, je hasarde des manières simples, et je demande à souper en même temps que l’un d’eux.

— Faut-il tuer un poulet ? me dit l’hôte ?

— Non ; je veux manger, comme ce garçon qui est là, de la soupe et un morceau de rôti.

— De quel vin désire monsieur ?

— Un pot de bière, comme à tous ces messieurs.

— Monsieur couche-t-il ici ?