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IV

LES PYRAMIDES



I — L’ASCENSION


Avant de partir, j’avais résolu de visiter les pyramides, et j’allai revoir le consul général pour lui demander des avis sur cette excursion. Il voulut absolument faire encore cette promenade avec moi, et nous nous dirigeâmes vers le vieux Caire. Il me parut triste pendant le chemin, et toussait beaucoup d’une toux sèche, lorsque nous traversâmes la plaine de Karafeh.

Je le savais malade depuis longtemps, et il m’avait dit lui-même qu’il voulait du moins voir les pyramides avant de mourir. Je croyais qu’il s’exagérait sa position ; mais, lorsque nous fûmes arrivés au bord du Nil, il me dit :

— Je me sens déjà fatigué… ; je préfère rester ici. Prenez la cange que j’ai fait préparer ; je vous suivrai des yeux, et je croirai être avec vous. Je vous prie seulement de compter le nombre exact des marches de la grande pyramide, sur lequel les savants sont en désaccord, et, si vous allez jusqu’aux autres pyramides de Saccarah, je vous serai obligé de me rapporter une momie d’ibis… Je voudrais comparer l’ancien ibis égyptien avec cette race dégénérée des courlis que l’on rencontre encore sur les rives du Nil.

Je dus alors m’embarquer seul à la pointe de l’île de Roddah, pensant avec tristesse à cette confiance des malades qui peuvent rêver à des collections de momies, sur le bord de leur propre tombe.