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VOYAGE EN ORIENT.

le roi de Prusse et dirigée par Lepsius, a visité les pyramides de Gizèh, et espère résoudre avec le même bonheur les autres difficultés de sa mission.

Je me repentis aussitôt de mon scepticisme hiéroglyphique, en pensant aux fatigues et aux dangers que bravaient ces savants qui exploraient, à ce moment-là même, les ruines du Labyrinthe.

Nous avions franchi l’entrée de la grotte : une vingtaine d’Arabes barbus, aux ceintures hérissées de pistolets et de poignards, se dressèrent du sol où ils venaient de faire leur sieste. Un de nos conducteurs, qui semblait diriger les autres, nous dit :

— Voyez comme ils sont terribles !… Regardez leurs pistolets et leurs fusils !

— Est-ce qu’ils veulent nous voler ?

— Au contraire ! Ils sont ici pour vous défendre, dans le cas où vous seriez attaqués par les hordes du désert.

— On disait qu’il n’en existait plus depuis l’administration de Mohamed-Ali !

— Oh ! il y a encore bien des méchantes gens, là-bas, derrière les montagnes… Cependant, au moyen d’une colonnate, vous obtiendrez des braves que vous voyez là d’être défendus contre toute attaque extérieure.

L’officier prussien fit l’inspection des armes, et ne parut pas édifié touchant leur puissance destructive. Il ne s’agissait au fond, pour moi, que de cinq francs cinquante centimes, ou d’un thaler et demi pour le Prussien. Nous acceptâmes le marché, en partageant les frais et en faisant observer que nous n’étions pas dupes de la supposition.

— Il arrive souvent, dit le guide, que des tribus ennemies font invasion sur ce point, surtout quand elles y soupçonnent la présence de riches étrangers.

— Allons, lui dis-je, ceci est proverbial et accepté de tous ! Je me rappelai alors que Napoléon lui-même, visitant l’intérieur des pyramides, en compagnie de la femme d’un de ses