donnent même, pour la plupart, dès qu’ils ont gagné de quoi passer quelques jours sans rien faire.
— Mais comment font les gens du pays ?
— Oh ! ils les laissent s’en donner à leur aise, et prennent deux ou trois personnes pour chaque emploi. Dans tous les cas, un effendi à toujours avec lui son secrétaire (khatibessir), son trésorier (khazindar), son porte-pipe (tchiboukji), le selikdar pour porter ses armes, le seradjbachi pour tenir son cheval, le kahwedji-bachi pour faire son café partout où il s’arrête, sans compter les yamaks pour aider tout ce monde. À l’intérieur, il en faut bien d’autres ; car le portier ne consentirait pas à prendre soin des appartements, ni le cuisinier à faire le café ; il faut avoir jusqu’à un certain porteur d’eau à ses gages. Il est vrai qu’en leur distribuant une piastre ou une piastre et demie, c’est-à-dire de vingt-cinq à trente centimes par jour, on est regardé par chacun de ces fainéants comme un patron très-magnifique.
— Eh bien, dis-je, tout ceci est encore loin des soixante piastres qu’il faut payer journellement dans les hôtels.
— Mais c’est un tracas auquel nul Européen ne peut résister.
— J’essayerai, cela m’instruira.
— Ils vous feront une nourriture abominable.
— Je ferai connaissance avec les mets du pays.
— Il faudra tenir un livre de comptes et discuter les prix de tout.
— Cela m’apprendra la langue.
— Vous pouvez essayer, du reste ; je vous enverrai les plus honnêtes, vous choisirez.
— Est-ce qu’ils sont très voleurs ?
— Carotteurs tout au plus, me dit le vieux soldat, par un ressouvenir du langage militaire. Voleurs ! des Égyptiens ?… Ils n’ont pas assez de courage.
Je trouve qu’en général ce pauvre peuple d’Égypte est trop méprisé par les Européens. Le Franc du Caire, qui partage