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qu’elle a prétendu expliquer, car le nombre des éléments ayant augmenté ou diminué, il est impossible que le fait se retrouve dans la théorie tel qu’il est dans la nature. Telle est la méthode que M. Royer-Collard appliqua à la méthode historique des systèmes sur la perception, et l’on voit qu’elle est générale comme sa méthode scientifique, et qu’elle s’étend à toute critique comme celle-là à toute recherche philosophique[1]. »

Armé de cette double méthode, M. Royer-Collard entreprit d’accomplir la double mission qu’il s’était donnée : consulter l’observation sur l’origine de nos idées, confronter les théories de la philosophie moderne avec les résultats de cette observation assidue, aidée par une sévère analyse. Aucune des théories de la philosophie moderne ne résista à cette redoutable enquête. À partir de l’illustre Descartes, l’aïeul involontaire du scepticisme moderne, jusqu’à Condillac, qui poussa jusqu’à l’absurde la logique d’un système erroné, tous furent convaincus d’avoir altéré, soit par addition, soit par soustraction, le fait de la perception. Chaque opération des sens, d’après l’analyse de M. Royer-Collard, contient une sensation, une percep-

  1. Nous avons cru devoir emprunter cette exposition de la méthode de M. Royer-Collard à un de ses deux élèves préférés, à M. Jouffroy qui, devenu maître à son tour, publia les fragments des leçons de son ancien professeur, en y ajoutant une introduction. Cette introduction et ces fragments parurent dans le troisième et le quatrième volume des Œuvres complètes de Thomas Reid, chef de l’école écossaise, publiées en 1828 par M. Th. Jouffroy.