Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/207

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Quand la restauration commence, on voit se grouper autour de MM. de Maistre, de Bonald, de Chateaubriand, Frayssinous, des esprits éminents qui marchent dans la même voie, mais avec leurs allures propres et leurs aptitudes. Il est un des nouveaux venus de ces luttes intellectuelles qu’il faut faire connaître ; à cause de l’éclat que jettera tout d’abord son talent d’écrivain : c’est M. de La Mennais.

Félicité-Robert de La Mennais était né à Saint-Malo, en juin 1782, précisément dans la même rue où, onze ans plus tôt, Chateaubriand avait reçu le jour ; il était d’une famille d’armateurs anoblis par Louis XIV, à la demande des états de Bretagne, pour avoir, en temps de guerre, apporté, à prix coûtant, du blé dans la province, par une année de disette. Ayant perdu sa mère, dans son enfance, il ne put trouver une atténuation à cet immense malheur dans les soins de son père, absorbé par les occupations de son commerce et l’état de ses affaires, que l’emprunt forcé et les captures des Espagnols avaient compromises. Les caresses et la sollicitude maternelle manquèrent à cette enfance déshéritée de cette douce lumière qui éclaire l’esprit et échauffe le cœur. Ses premières années révèlent chez lui une intelligence ardente ; une disposition marquée à cheminer à son heure, à son pas, dans sa route : ce fut une vieille gouvernante qui, non sans peine, lui apprit à lire. Il avait neuf ans quand son frère aîné, M. Jean de La Mennais, voulut lui enseigner le latin ; mais le disciple indocile abandonna