Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/376

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obscurité, qu’il la changera en auréole. La vanité, qui est la bêtise des gens d’esprit, lui donnera jusqu’à cette autre manie des sectaires, de ne pas vouloir d’intermédiaire entre eux et Dieu, comme ils disent, et de se substituer aux prêtres. Béranger, le pontife du dieu des bonnes gens, auquel il se confie le verre en main ordonnera au clergé, lors de l’enterrement de son ami Quénescourt, de cesser le Miserere pour le laisser chanter[1]. Lorsqu’on accusera Escousse et Lebras, ces jeunes et tristes victimes de la maladie du suicide, d’avoir douté de Dieu, il se canonisera lui-même dans une note, sous prétexte de justifier ses jeunes amis, et avec une complaisance et une gravité qui prouvent qu’on n’échappe pas à ses ridicules en chansonnant ceux d’autrui, il écrira les lignes suivantes, qui ne sont pas les moins gaies de son recueil : « Une feuille publique a accusé Escousse d’incrédulité ; pour repousser cette accusation, je me crois obligé de citer les derniers mots de la lettre qu’il m’écrivit quelques heures avant l’exécution de son déplorable dessein : «  Vous m’avez connu, Béranger ; Dieu me permettra-t-il de voir du coin de l’oeil la place qu’il vous réserve là-haut ? » Un écrivain aussi spirituel que sensé[2] a dit à ce sujet : « Le

  1. Descendu là sans s’appuyer sur vous,
    Dans l’autre vie il entre exempt d’alarmes.
    Qu’est-il besoin que votre Dieu jaloux
    De son enfer vienne effrayer nos larmes ?
    Cessez vos chants, prêtres ; c’est à ma voix
    De le bénir pour la dernière fois.

  2. M. de Pontmartin.