Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/449

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choses dans un vague tout à fait propre à favoriser l’illusion.

Courier commença alors contre la restauration une guerre qui lui fit un mal incroyable. C’était une tracasserie perpétuelle au sujet de toutes ses tendances et de tous ses actes ; mais une tracasserie spirituelle, mordante, acérée. Ce terrible homme ne lui laissait point une heure de relâche, et sous sa plume les plus petits faits devenaient des événements. Un curé, plus rigoureux ou moins indulgent que les prêtres des paroisses voisines, exhortait-il les filles d’un village à ne point aller à la danse, ou les paysans à ne point hanter le cabaret, les épigrammes de Courier montaient au clocher et sonnaient le tocsin pour annoncer l’arrivée de l’inquisition à la France, que le pamphlétaire faisait assister tout entière à ce prône. Comme cet esprit d’opposition savait admirablement arranger les choses pour donner tort à l’autorité, il se trouvait toujours que le prêtre était d’un ridicule infini, un perturbateur des plaisirs innocents d’une population de l’âge d’or ; car, depuis que Courier s’était proclamé vigneron, il avait arrêté qu’il n’y aurait plus que des vertus sous les toits de chaume. Hélas ! il devait, par sa propre destinée, donner lui-même à ce paradoxe un triste démenti ! Un maire exerçait-il son autorité d’une manière qui déplaisait à Paul-Louis, refusait-il de donner toujours raison au garde de ses bois, cette affaire de village devenait une affaire d’État. Puis, passant du particulier au général, le redoutable pamphlétaire pei-