Page:Nichault - Anatole.djvu/136

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L’aspect d’un lieu aussi imposant modéra bientôt cette vive gaieté, qui fit place au respect religieux qu’imprime à tous les âges la vue d’un temple révéré. Le silence, habitant de ces voûtes gothiques, semble inviter l’enfant qui les parcourt, comme le vieillard qui vient y prier, à n’en point troubler le repos. Une sainte terreur s’empara de l’âme de Valentine, lorsqu’elle se vit, pour ainsi dire, seule entre ces trois puissances, la divinité, les grandeurs et la mort.

— C’est donc ici, pensa-t-elle, que viennent se briser les sceptres de nos rois ! Celui dont l’ambition ensanglanta la terre repose à côté du héros qui mourut pour son pays, et le même caveau renferme l’auteur de la Saint-Barthélemy et la victime du fanatisme. Ici pour le crime et pour la vertu les honneurs sont égaux ; le rang seul les assigne ; mais toute la pompe des monuments élevés à la tyrannie ne diffère pas de l’horreur qu’inspire le souvenir de ses cruautés. On s’éloigne en frémissant du superbe tombeau de Catherine de Médicis, pour venir tomber aux pieds de celui de Henri IV, et l’arroser des larmes du regret et de la reconnaissance.

Le suisse de l’abbaye vint interrompre les méditations de Valentine, en lui débitant du ton le plus emphatique et le plus monotone, les noms et les titres des princes qui étaient inhumés dans les différentes chapelles. Après lui avoir fait passer en revue les tombeaux de nos rois, depuis la première jusqu’à la dernière race, il la conduisit dans la chapelle