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Au sortir de l’église, M. de Richelieu reçut la députation des états accompagnés des échevins, et du commandant des notables de la ville ; ils venaient lui demander, au nom de la province, l’honneur d’être marraine de l’héritière des Guise et des Richelieu ; deux jours après, avec toute la pompe d’une cérémonie solennelle, la nouvelle-née fut baptisée sur les fonts de l’antique Maguelone, et reçut le nom de Septimanie, nom gothique de cette belle province de France.

Tant d’honneurs et de joie semblaient présager un heureux avenir, et pourtant l’enfance de Septimanie de Richelieu fut frappée du plus grand des malheurs. La santé de sa mère, déjà affaiblie par une couche pénible, donna bientôt de vives inquiétudes. Les médecins de Montpellier, qui passaient alors pour les plus savants de toutes les Facultés, décidèrent que les chaleurs de l’été dans ce climat seraient funestes à la ma­lade, et lui ordonnèrent de retourner à Paris.

Le duc de Richelieu, que ses grandes dissipations contraignaient souvent à de ridicules économies, avait loué son hôtel de la place Royale pour tout le temps que durerait la tenue des états du Languedoc, et la duchesse de Richelieu alla de­meurer au Temple, dans la maison de son père. Hélas ! les tendres soins qu’elle reçut de sa famille et de son mari, dont l’attachement pour elle l’emporta toujours sur ses goûts fri­voles, et fut le plus vif sentiment de sa vie amoureuse, le bonheur d’être deux fois mère, la paix d’une existence à la fois douce et honorée, ne purent triompher de sa maladie ; elle succomba dans le mois d’août 1740 à une inflammation de poitrine.

La nuit où elle mourut, on vint avertir le duc de Richelieu qu’elle était au plus mal. Il vole aussitôt près d’elle ; sa vue semble la ranimer :

— Ah ! j’en veux beaucoup, dit-elle, à ceux qui vous ont fait venir ; je voulais vous éviter le chagrin de me voir mourir ; mais, puisque vous voilà, embrassez-moi pour la dernière fois[1].

  1. Vie du maréchal de Richelieu, tom. II.