Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/165

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ne seraient jamais parvenues au roi, si les premiers rayons du jour n’eussent averti madame de la Tournelle qu’il n’y avait plus un moment à perdre pour satisfaire à sa superstition amoureuse.

Il est de certaines démarches si intéressantes par elles-mêmes, qu’on s’inquiète peu des mots qui les accompagnent. Quand Lebel entra dans la chambre du roi portant le petit billet qu’un des gens de la marquise venait de lui remettre, la vue de ce billet suffit pour livrer Louis XV à des transports de joie, même avant de l’avoir lu ; il doubla les étrennes de Lebel, comme pour le récompenser de lui apporter un si heureux présage.

Tout concourait à lui prédire une année de bonheur ; la reine avait consenti aux nouvelles nominations qu’il lui avait proposées ; la marquise de Flavacourt et la marquise de la Tournelle venaient d’être portées sur la liste des dames du palais ; il est vrai qu’à la première nouvelle de ces nominations, la comtesse de Mailly avait donné sa démission ; mais le roi s’alarma peu de cet acte de dépit ; il savait avoir plus d’un moyen d’apaiser la jalousie de madame de Mailly : d’ailleurs madame de Flavacourt, étant de moitié dans cette faveur royale, la légitimait aux yeux du public.

Ces petits événements de cour donnèrent lieu aux suppositions les plus contraires : les uns prétendaient que la reine n’avait consenti à voir madame de la Tournelle attachée à sa maison, en qualité de dame du palais, qu’après s’être assurée que le roi avait renoncé à la séduire, et qu’il n’existait entre eux aucune intimité coupable. D’autres voyaient dans cette nomination la marche ordinaire d’une faveur naissante, qui devait d’autant plus s’élever, qu’elle s’efforçait de garder une attitude humble. L’opinion de ces derniers s’appuyait encore sur ce que les grâces distribuées tombaient toutes sur les amis ou sur les partisans de madame de la Tournelle.

La nouvelle de la mort du marquis de Breteuil attrista cette journée. Il était chancelier de la reine, qui le regretta sincèrement ; mais il laissait vacante la place de secrétaire d’État de la guerre, celle de chancelier de la reine ; et l’ambition des uns, la curiosité des autres eurent bientôt distrait de sa mort.

Le duc de Richelieu, que son étoile ramenait toujours à