Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/192

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hésitant à donner leur avis sur un mystère qui leur semblait inexplicable.

Les soins de leur parures obligèrent bientôt les femmes à se séparer ; l’étiquette étant bannie du château de Choisy, les robes de la cour n’y étaient point admises, mais l’élégance y devait remplacer la richesse des vêtements ; il y avait une sorte d’émulation de bon goût qui tournait au profit de la beauté. C’est là qu’on lançait une mode nouvelle, elle était quelquefois discutée, critiquée ; mais quand elle obtenait le suffrage des autorités en ce genre, on la voyait bientôt adoptée par toutes les jolies femmes de la cour et de la ville.

On est quelquefois novateur sans y penser. Dans l’agitation où se trouvait madame de la Tournelle, elle avait oublié de commander la guirlande qui devait aller avec la robe de satin blanc, garnie de dentelles, destinée à être mise ce jour-là ; mademoiselle Hébert se désolait de cet oubli.

— Comment allons-nous faire ? disait-elle d’un accent douloureux ; madame la marquise n’a pas voulu qu’on apportât son écrin, ni fleurs, ni plumes, ni bijoux, que va-t-elle mettre dans ses cheveux ?

— Rien, mademoiselle Hébert.

— Cela n’est pas possible, madame serait la seule. Les femmes de chambre de la princesse, celles de madame la duchesse de Chevreuse, viennent de me montrer de quoi faire des coiffures charmantes à leurs maîtresses, et ce serait dommage de voir madame moins parée que ces dames.

— Qui sait ? une coiffure toute simple va quelquefois mieux que celle qui a coûté bien de la peine à faire ; d’ailleurs je n’ai pas le choix, et je me console de ce petit malheur en pensant que mon mal de tête s’en trouvera fort bien.

— Au fait, madame a de si beaux cheveux !

Et mademoiselle Hébert, voyant sa maîtresse si bien résignée à n’être que jolie, n’osa plus gémir sur l’oubli de la guirlande, et s’appliqua à faire croire au coiffeur de la cour que la dernière mode excluait toute espèce d’ornemens dans les coiffures en cheveux.

Madame de la Tournelle faisait agrafer sa robe lorsque le galop de plusieurs chevaux se fit entendre dans les cours