Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/238

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cette résistance fut vaine. Les lettres patentes furent expédiées, et Louis XV voulut que le mérite personnel de madame de la Tournelle fût spécifié dans les lettres patentes comme le principal motif de cette faveur.

Le roi avait ordonné qu’aussitôt enregistrées, ces lettres lui fussent envoyées directement ; car, tous ces débats, il avait eu soin de les laisser ignorer à madame de la Tournelle ; il savait trop bien qu’elle aurait employé toute sa puissance sur lui pour le détourner de son dessein.

Un coffret d’ébène incrusté d’or, aux armes de la maison de Mailly de Nesle, sur lequel se trouvait inscrit en lettres de diamants le nom de la duchesse de Châteauroux, renferma ces lettres patentes et le contrat de quatre-vingt mille livres de rentes ; le roi y joignit la prière la plus instante d’accepter ces témoignages de sa haute estime. Ce billet ne renfermait pas un mot d’amour, rien qui put alarmer la délicatesse de madame de la Tournelle. Il finissait par cette phrase si simple :

« Ne refusez pas l’ami qui doit tant à vos conseils » Louis XV saisit le moment où elle rendait visite à la princesse de Conti pour faire porter le coffret sur la console du salon de madame de la Tournelle.

Cette royale surprise fut mêlée de quelques regrets : la nouvelle duchesse craignit qu’une faveur d’un si haut prix n’excitât des murmures ; mais le roi, qui avait prévu ces craintes, s’était arrangé pour que les félicitations l’emportassent de beaucoup sur les murmures.

Et puis tant de personnes étaient attachées à la fortune de madame de la Tournelle !

Le coffret sur ses genoux, elle méditait encore sur ce don magnifique et sur la manière charmante dont il était offert, lorsqu’on annonça madame de Tencin ; elle cacha vite le coffret sous la console, car elle désirait ne faire connaître sa nouvelle dignité que le lundi suivant, quand elle serait avec le roi à Fontainebleau.

Madame de Tencin fut bientôt suivie de mesdames de Brancas, de Chevreuse, enfin de presque toute la cour. Accablée par tant d’hommages, de visites, elle eut à peine le temps décrire ces mots sur ses tablettes, et de les envoyer à Louis XV

« À ce soir pour gronder l’ami et remercier le roi.

» LA DUCHESSE DE CHÂTEAUROUX. »