Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/258

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Elle disait vrai ; mais le roi, ne s’en flattant pas, eut recours à la gaieté de ses amis pour la distraire ; il ordonna le souper dans les petits appartements, où se trouvait la fameuse table inventée par Loriot ; au moyen de ressorts cachés, le parquet qui portait cette table disparaissait avec elle, et le tout remontait aussitôt avec un nouveau service ; ce qui donnait à ces soupers intimes quelque chose de magique. Desservantes de bois de rose, couvertes d’assiettes de vermeil, de flacons remplis de vins de plusieurs espèces, remplaçaient les domestiques ; et n’étant point gênée par aucun témoin importun, la conversation devenait alors confiante et gaie. Elle le fut ce jour-là plus que de coutume, car chacun avait un regret à dissimuler ou un pressentiment à vaincre.



L

LES DEUX DÉPARTS


Le lendemain 2 mai[1], le roi soupa au grand couvert avec la reine. Il ne fut point question de voyage. Après le souper, il entra chez la reine, lui parla quelque temps du mariage de M. le Dauphin, dont la célébration aurait lieu à son retour de l’armée ; puis, ayant donné l’ordre pour son coucher à une heure et demie, il rentra effectivement dans sa chambre comme pour s’y coucher. Mais il ne fit que changer d’habit, et se mit à écrire, d’abord à madame la Dauphine, après avoir nommé aux places de sa maison ; ensuite il traça quelques lignes pour la reine, dans lesquelles il témoignait le regret de ne pouvoir l’emmener avec lui, à cause des dépenses que nécessiterait un pareil déplacement ; il adressa au Dauphin les adieux les plus tendres, et une lettre secrète à l’archevêque de Paris. Puis il prévint par quelques mots madame de Châteauroux qu’il venait de

  1. Histoire de France. — Mémoires de Richelieu.