Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/263

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et que son premier soin en y entrant fut d’aller visiter l’hôpital, pour s’assurer de la manière dont on y traitait les malades.

Il eut la douleur de voir blesser mortellement à cette affaire le marquis de Beauvau, maréchal de camp, homme de talent, de probité et d’esprit, regretté de toute l’armée et pleuré par madame de Châteauroux, dont il était l’ami : succombant aux douleurs les plus vives, il dit aux soldats qui le portaient ces nobles paroles : Mes amis, laissez-moi mourir, et allez combattre.

Les généraux anglais et autrichiens qui commandaient vers Bruxelles, témoins de nos progrès, ne pouvaient les arrêter. Un corps commandé par le comte de Saxe était si bien posté, et couvrait les sièges si à propos, que les succès étaient assurés.

Au milieu de ces succès, la nouvelle arrive que les Autrichiens ont passé le Rhin du côté de Spire ; que l’Alsace est entamée ; que les frontières de la Lorraine sont exposées. Le roi fait aussitôt appeler le maréchal de Noailles, lui ordonne de se mettre en marche avec son corps d’armée, et de courir au secours de l’Alsace, il envoie le duc d’Arcourt avec quelques troupes garder les gorges de Phalsbonrg, puis il se prépare à marcher à la tête de vingt-six bataillons et de trente-trois escadrons. Ce parti que prenait le roi dès sa première campagne transporta le cœur des Français[1].

L’est alors que madame de Châteauroux s’enorgueillit de son ouvrage ; ce roi si actif, si brave, si ingénieux dans ses moyens, si fort dans ses résolutions, qu’il ressemblait peu à l’élève timide du cardinal de Fleury, à l’indolent amant de madame de Mailly !

Lorsqu’elle entendait exalter la conduite de Louis XV par le peuple et l’armée, madame de Châteauroux, sachant la part qu’elle y avait, se Battait qu’on lui en tenait compte.

— Oui, disait le roi, en se séparant d’elle pour voler à l’ennemi, oui, je veux, à force de conquêtes, te rendre l’amour des Français comme tu es le mien : je veux qu’ils bénissent en toi la gloire du pays, Je bras qui les défend, le roi qui les gouverne ; je veux qu’ils sachent que, dans ce cœur adorable, j’ai puisé tous les sentiments qu’ils honorent

  1. Voltaire. — Lacretelle. — Mémoires du maréchal de Noailles.