Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/314

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— Un de nos cousins, Sire, un vieil officier de Votre Majesté ; un homme courageux, que ses craintes pour ma sœur rendent presque insensé ; j’espère qu’il s’exagère le danger.

— Il vient de la voir !… et il pleure ! dit Louis XV en pâlissant.

Alors il marche avec vivacité vers la porte de la chambre à coucher, l’ouvre le plus doucement possible ; puis, faisant signe aux personnes qui étaient là de ne point se lever, il s’approche silencieusement du lit de la malade. Hélas ! quel triste spectacle frappe ses yeux ! qu’il a peine à contenir un cri de douleur et d’effroi en voyant l’altération sinistre des traits de ce beau visage !



LXI

DERNIERS CONSEILS AU ROI


Cependant madame de Châteauroux s’est parée pour recevoir le roi : un couvre-pieds de dentelle, doublé d’une étoffe bleu de ciel, un manteau de lit pareil, des nœuds de ruban, une baigneuse élégante d’où s’échappent quelques boucles de ses beaux cheveux, offrent l’aspect d’une parure de convalescente. Mais tant de soins pour dissimuler l’effet de ses horribles souffrances en rendent encore les ravages plus frappants.

La duchesse de Modène, madame de Lauraguais, mademoiselle Hébert sortent. Elles trouvent les salons, les antichambres remplis des seigneurs, des dames de la cour qui viennent eux-mêmes savoir des nouvelles de la duchesse. La foule de curieux qui ont suivi le carrosse du roi questionnent avec intérêt les gens de l’hôtel. La pitié, la justice ont remplacé la malveillance.

Resté seul avec la malade, le roi veut lui parler, mais le souvenir de madame de Vintiraille, ce même regard, brillant dans des yeux battus, dont la paupière se soulève avec peine, cette oppression, ces couleurs vives de la fièvre qui animent une partie du visage, quand l’autre est déjà couverte de la pâleur de la mort, il les reconnaît, et la terreur s’empare de son âme ; il ne peut proférer un mot.