Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/76

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mieux n’y plus penser. Il est bien assez de jolies femmes à là cour pour distraire de son souvenir. En finissant ces mots, le roi passa dans son cabinet pour écrire à madame de la Tournelle.



XV

UN BILLET


Établie depuis quelques jours au château de Plaisancel jouissant du bonheur de se trouver au milieu de véritables amis, dans un lieu où la nature et le luxe le mieux entendu se réunissaient pour en faire le séjour le plus agréable, madame de la Tournelle commençait à retrouver un peu de calme, lorsque mademoiselle Hébert lui remit, un matin, le billet qu’un courrier arrivant de Versailles venait de lui donner.

En reconnaissant l’écriture, madame de la Tournelle sentit un tremblement tel qu’elle eut peine à briser le cachet. Elle resta longtemps immobile, les yeux fixés sur le billet, qui pourtant ne contenait que ces mots :

« Par grâce, n’épousez point le duc d’Agenois ; ce mariage ne vous rendrait pas heureuse, et il me causerait un chagrin mortel.

 » Louis. »

Voilà ce qu’après de grands combats entre son dépit, sa fierté et son amour, le roi n’avait pu s’empêcher d’écrire, parce qu’effectivement l’idée de ce mariage le mettait au désespoir, parce que toutes les plus belles phrases n’auraient pas mieux dit sa pensée, et n’auraient pas été plus droit au cœur de madame de la Tournelle ; c’était un appel à sa bonté plutôt qu’une déclaration romanesque ; pouvait-elle s’en offenser ?

— Je lui obéirai, dit-elle en cachant le billet dans son corsage ; jamais je ne lui causerai de chagrin ; c’est bien assez de sacrifier…

Et des larmes l’empêchèrent d’achever sa pensée.