Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/90

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— De bien moins, et de bien plus que tout cela.

— C’est de quelque nouveau tour de Faquinet[1], je parie, dit madame de Flavacourt.

— Non ; le dernier lui a trop mal réussi, il se repose.

— Vous voulez peut-être parler de la scène qui a eu lieu entre madame de Mailly et le duc de Richelieu ? On dit qu’elle lui a fait de sanglants reproches au sujet… Et l’embarras de s’expliquer devant madame de la Tournelle fît que madame de Mirepoix ne continua pas sa phrase.

— Enfin, de quoi s’agit-il ? demanda madame de la Tournelle avec impatience.

— D’une visite, répond M. Duverney.

— Encore quelque auteur philosophe ? dit madame de Flavacourt.

— Non, vraiment, c’est bien assez de vous avoir livré une aussi bonne tête que celle de M. de Montesquieu. Voua avez fait entre nous assez de frais pour le séduire ; eh bien, il faut être encore, s’il se peut, plus belles et plus aimables demain.

— Eh ! de qui donc nous menacez-vous ainsi ? demanda madame de Brancas. Il faut que ce soit quelque personnage important, car j’ai vu tout à l’heure porter des lustres dans les serres, et couvrir les dalles de riches tapis. C’est peut-être l’ambassadeur turc ; quelle charmante surprise !… pour nous, et pour lui ; car voilà déjà un petit harem fort bien composé, ajouta-t-elle en montrant ces dames. Si cette folle de duchesse de Boufflers était encore ici, elle voudrait nous faire habiller toutes en odalisques, j’en suis sûre.

— Ce grand personnage-là ne vous en saurait aucun gré, madame, reprit-il ; ce n’est pas qu’il dédaigne les soins qu’une jolie femme prend de lui plaire ; mais vous perdriez beaucoup à ses yeux en vous déguisant.

— Cela m’est fort indifférent, dit madame de Mirepoix, je suis venue à la campagne pour échapper à l’ennui des grandes toilettes de cour ; ainsi, ne comptez pas sur moi pour vous faire honneur.

— Quant à moi, dit madame de la Tournelle, votre Turc

  1. Sobriquet donné par les deux sœurs à M. de Maurepas.