Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

passer une nuit dans l’île, cette action dût-elle sauver la vie d’un homme, et voilà où conduit l’ignorance ! Comment ose-t-on dire, après cela, qu’elle est nécessaire au bonheur du peuple ?

Cette aventure a cependant quelque chose de singulier, je ne la comprends pas ; mais comme il n’en résulte rien de fâcheux, il est inutile de s’en inquiéter. J’ai défendu qu’on en parlât à ma fille : les enfants sont toujours disposés à croire au merveilleux, et je veux qu’Emma ignore longtemps les absurdités qu’on apprend aux enfants de son âge.



XX


Tu me grondes avec raison, chère Juliette ; je suis inexcusable d’être restée plus d’un mois sans t’écrire ; mais tu connais ma bizarrerie, tu sais avec quelle passion je me livre aux ouvrages que j’entreprends. Mon tableau était à moitié fait, j’ai voulu l’achever avant que les jours devinssent plus sombres, et j’ai travaillé avec tant d’assiduité que je me suis rendue malade. J’admire, mais je ne comprends pas les personnes qui se font un plan d’occupation dont rien n’altère jamais la régularité ! Je connais une femme qui se dit le matin, je lirai tant de pages, je