Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/213

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blesse l’aurait réduite ? Ah ! par grâce pour moi, par pitié pour vous et pour elle, épargnez-lui des maux irréparables et ne vous laissez pas entraîner par les discours d’un homme qui, par état, est contraint de vous abuser.

Dans ce moment l’abbé entra ; j’ai lu dans ses yeux une expression de colère, qui me fit soupçonner qu’il avait entendu mes dernières paroles ; en effet, j’étais emportée par mon indignation, et je les ai prononcées à haute voix ; ce qu’il dit m’affermit bientôt dans mon doute : il apportait à madame de Varannes une lettre de l’archevêque d’A***, qui lui mandait que l’abbesse du couvent de Caroline se disposait à la recevoir ; et qu’ayant fait une donation à la maison, pour les dots et pensions des novices qu’il prendrait sous sa protection, il la priait de vouloir bien mettre Caroline du nombre de celles auxquelles il s’était engagé de servir de père.

Mon sang bouillait dans mes veines pendant la lecture de cette lettre ; à peine fut-elle achevée, que j’implorai madame de Varannes, au nom de tout ce qui lui était cher, pour obtenir d’elle qu’elle ne cédât point aux offres de l’archevêque. La présence de l’abbé, au lieu de m’intimider, enhardit ma franchise. Il combattit mes raisonnements avec aigreur et faillit m’attérer, quand il me dit :

— Ne vaut-il pas mieux, madame, que mademoi-