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LVI


Je ne sais comment te raconter ce qui vient de m’arriver, Juliette… je l’ai vu, et j’y crois à peine… Ce matin, retenue chez moi par le mauvais temps, je travaillais dans mon cabinet, quand Lise vint m’annoncer la visite de sir James… À cette nouvelle, mon cœur battit de joie, et sans penser à cacher mon trouble, je donnai l’ordre de le laisser entrer. Je me félicitais de pouvoir l’entretenir un moment… mais, ô ciel ! que devins-je ! lorsque je le vis s’approcher de moi… fixer d’un œil égaré le portrait de Henri… faire un mouvement d’horreur… et se précipiter hors de la chambre… Je crus quelque temps que mon imagination se repaissait d’un songe ; je me levai, et m’étant approchée de ma fenêtre, j’aperçus sa voiture qui s’éloignait… Saisie de cette apparition, je tombai sur un siége et restai immobile : l’arrivée de Frédéric me tira de cette espèce d’assoupissement ; à sa physionomie je crus qu’il venait m’annoncer un nouveau malheur, et mon étonnement redoubla quand il me dit :

— Excusez cette démarche, madame, j’en sens