Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/258

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prouver ; malgré ses torts il est digne de l’intérêt qu’il vous inspire, et j’espère apprendre bientôt que vos vœux et les siens sont satisfaits.

En finissant ces mots, il sortit et me laissa dans un état impossible à décrire. Madame de Gercourt interpréta mon trouble en faveur de Frédéric ; je n’avais plus aucun intérêt à détruire son erreur ; et sans écouter ce que tous deux me disaient, je donnai l’ordre qu’on mît à ma voiture des chevaux de poste, et nous repartîmes sans qu’ils aient obtenu un seul mot de ma bouche.

Depuis trois heures que je suis de retour, enfermée dans mon appartement, je t’écris et je pleure,… mais tranquillise-toi, Juliette, ta Laure triomphera bientôt de sa faiblesse… elle avait une excuse dans l’espoir d’être aimée… présentement sa passion la rendrait méprisable, si elle avait la lâcheté de s’y abandonner !… c’est lui qui me conseille de lui être infidèle !… il me verrait d’un œil paisible répondre à l’amour de Frédéric… il le désire… ô ciel !… et je pourrais regretter un cœur si peu digne du mien ? Non, mon amie, je n’ai plus rien à redouter, son indifférence a glacé mon cœur ; il a repris sa fierté, son courage, il se félicite de n’avoir jamais confié qu’à toi l’indigne amour dont il fut consumé, pour qu’il n’en reste désormais qu’un faible souvenir.