Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/284

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délicatesse ; mais ce que vous ignorez, Laure, c’est que le meilleur ami de M. d’Estell fut la cause innocente de toutes nos infortunes.

« Le chevalier Delval fut l’amant qu’elle me préféra ; elle le rencontra chez la comtesse de L…, où j’avais toujours refusé de l’accompagner, étant brouillé avec la maîtresse de la maison, depuis mon premier voyage en France. Le chevalier en devint amoureux ; il est aimable, d’une charmante figure, et possède une grande fortune ; c’était plus qu’il n’en fallait à milady pour l’engager à répondre à son amour. Mon caractère sérieux lui parut insupportable, en comparaison de l’enjouement de Delval. D’ailleurs le courroux de mon père ne s’apaisait point ; elle me vit prêt à être dépouillé de mon héritage, et cette dernière considération la porta à me sacrifier. Elle cacha soigneusement nos liens au chevalier, et partit avec lui le jour où il reçut l’ordre de rejoindre son régiment. Peignez-vous ce que j’éprouvai lorsqu’on me remit le billet qui m’apprenait sa fuite. Je ne crus pas un mot de ce qu’il m’apprenait sur les motifs qu’elle disait l’avoir guidée. J’aurais dû mépriser cet indigne procédé ; mais la violence de mon caractère ne me le permit pas, et les transports de la jalousie, le désir de la vengeance s’emparèrent de mon âme. Après bien des recherches, j’appris qu’elle était partie avec un officier, et qu’ils devaient