Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/298

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tromper, diras-tu ; il pourrait être heureux et mourir, et je dois à sa vertu le repos de ma vie !… Ma Laure, laisse échapper ce pardon de ta bouche !… Permets que j’aille le recueillir à tes pieds !… que je les baigne encore de mes larmes, et que pour la dernière fois, je lise dans tes yeux, ma grâce et ta faiblesse !… Le jour paraît. Dans ce moment, tu reposes peut-être : ah ! puisse-tu recevoir cette lettre, avant de te convaincre par toi-même du meurtre de ton époux ! Puisse mon repentir fléchir ta colère, et t’inspirer une douce pitié… Ah ! Laure ! hésite avant de prononcer l’arrêt de ton amant. Un seul mot l’aidera à supporter son supplice, ou l’affranchira de ses serments. »

Laure avait paru lire cet écrit avec une effrayante tranquillité, sa respiration était devenue plus étouffée à mesure qu’elle approchait de la fin, et pas une larme ne mouillait sa paupière, quand elle laissa retomber la lettre : étrange effet de la douleur ! qui reportant vers notre âme toutes nos sensations, semble ne multiplier ses forces que pour les épuiser, et finir par la rendre insensible.

Juliette, cette tendre amie, aussitôt après avoir reçu la dernière lettre de Laure, avait obtenu de son mari la permission de partir sur-le-champ pour Varannes. Elle disposait tout pour hâter son voyage, quand elle reçut la visite du chevalier Delval, ancien ami de M. et madame d’Estell. S’étant informé du