Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/81

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pour son bonheur en lui donnant l’exemple d’une rupture nécessaire. Il ne fut pas dupe de ce beau prétexte, et se transporta sur-le-champ à l’hôtel de milady, où il apprit qu’elle était partie le soir même avec un officier français. Figure-toi, ma chère Juliette, ce qu’un homme aussi passionné que sir James dut éprouver à cette affreuse nouvelle. Il se livra à tous les transports d’une jalousie effrénée ; les suites en furent terribles, et l’on ne sait pas jusqu’où se serait portée sa vengeance, s’il eût trouvé à l’assouvir. Lucie, dans cet endroit de son récit, a paru me cacher quelque chose ; peut-être cet infortuné n’a-t-il pas résisté au désir de punir l’indigne objet de son amour : peut-être lui a-t-il fermé pour jamais l’entrée de sa patrie, en y faisant connaître son déshonneur ! C’est à présumer, puisqu’elle s’est vue contrainte de se retirer dans un couvent au fond de l’Allemagne ; cependant ceci n’est qu’une supposition de ma part, et cette action, toute motivée qu’elle soit, me paraît indigne de la noblesse de son caractère.

Après un si funeste événement, retourner dans sa patrie, eût été un nouveau supplice pour sir James ; il ne vit plus dans le monde qu’un asile pour lui, et le trouva près de sa sœur. C’est dans son sein qu’il déposa ses peines ; la tendre amitié en adoucit l’amertume, et le spectacle du bonheur de Lucie calma