Page:Nichault - Le Mari confident.pdf/293

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la vengeance. Quand je donnerais ce qui me reste à vivre pour la voir un instant en proie au même supplice qu’elle m’inflige. Ah ! mon ami ! si tu savais ce que je souffre ! L’empire que cette femme exerce sur moi, le délire où me plongeait l’espoir de l’obtenir ! la rage qui me saisit à l’idée qu’un autre la possède !…

Et Sosthène, étouffé par ses larmes, en inonde le sein de son ami. Adalbert le serre sur son cœur sans pouvoir trouver un mot de consolation à lui adresser, tant il se sent torturé de la même douleur, et de plus agité de remords ; accablé sous le poids d’un secret qui devient à chaque minute plus difficile et plus essentiel à garder, il médite vingt projets qui tous ont pour but de tuer l’infâme qui déshonore sa femme, puis de s’éloigner à jamais d’elle, dût-il se condamner à un éternel exil ; mais avant de tout sacrifier à sa féroce jalousie, il veut savoir qu’elle est fondée ; il éprouve cette incrédulité qui succède à tous les violents coups du sort ; il espère dans l’aveuglement de Sosthène, dans ces visions d’un amour insensé qui montrent alternativement ce qu’on désire et ce qu’on redoute. Il veut apprendre de Ricardo, lui-même, ce que Ricardo a vu et entendu, et, ferme dans sa résolution, il persuade Sosthène de la nécessité de cacher son