Lisieux une amitié passionnée que beaucoup de gens prenaient pour de l’amour. Trop spirituel, trop modeste pour espérer de lui plaire, il se contentait de la voir aussi souvent que ses accès de goutte pouvaient le lui permettre. Il aspirait, lui disait-il, à la place de confident, sachant bien qu’il n’en méritait plus d’autre ; mais tout en paraissant résigné au plus petit rôle, il avait grand soin d’observer si personne ne s’emparait du premier, et il ne savait pas lui-même ce qu’il éprouverait s’il venait un jour à faire cette découverte.
Mathilde, née d’une de ces grandes familles de France qui ont accepté du service à la cour de Napoléon, avait été élevée dans l’idée d’épouser le jeune Alfred de Lisieux, qui dès l’âge de seize ans avait conçu pour elle l’amour le plus dévoué. Le duc de Lisieux, son père, opposé d’opinion à la mère de Mathilde, ne désirait point ce mariage ; et lorsque son fils arriva à sa majorité, la crainte de le voir prendre un parti violent avait engagé le duc à faire faire un voyage à Alfred : il espérait que les beautés de l’Italie, et la rencontre de tant de personnes distinguées qui la visitent, le distrairaient de sa passion pour Mathilde.
Alfred avait cédé à la volonté de son père, mais à la condition de voir ses désirs comblés, s’il revenait de son exil dans les mêmes sentiments pour Mathilde.
Il était parti plein d’espérance, certain d’être aimé d’elle, et ne doutant pas d’obtenir à son retour ce qu’il désirait de la tendresse de son père. Mais arrivé à Na-