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ments ou les intérêts des opposants à sa dernière opinion ; entremêlant ses récits de légères personnalités pour les rendre plus piquants, elle se fait craindre, détester, mais elle échappe du moins à cette implacable ennemie des vieilles filles, à l’indifférence.

Sa vie, que l’inutilité devait condamner à l’ennui, est semée d’agitations, de tracasseries, de petits triomphes, dont sa malice fait des plaisirs. Elle est toujours là pour jouir des humiliations du parti qui succombe, et dit, avec l’accent d’une fausse pitié : « Hélas ! je l’avais bien prévu, » à chaque événement qui flatte sa politique vindicative ; enfin, elle donne à la haine tout ce qu’elle n’a pu dépenser en amour ; c’est vivre encore, et comme son talent de médire l’oblige à tout savoir, on l’invite comme on s’abonne à un petit journal qui dit du mal de beaucoup de monde.

La dernière espèce de vieilles filles et la meilleure, il faut l’avouer, est à peine ridicule ; mais aussi son bonheur n’est pas de ce monde. Tout aux intérêts d’autrui, celle-là se consacre aux soins qu’exige une vieille mère, un parent, une amie. A-t-elle une sœur belle, et qui aime à briller, elle immole ses jours, son avenir, au bon-