déchirants au moment de quitter les Tuileries, et de céder ces appartements si magnifiquement décorés pour elle à la jeune rivale qui devait bientôt les occuper.
Madame de Cernan arrivait de chez le célèbre Leroy, où l’on montrait l’admirable corbeille destinée à Marie-Louise. L’empereur avait voulu voir par lui-même si les présents qu’il offrait à la fille des Césars étaient dignes d’elle ; rien ne lui semblait assez beau pour parer sa nouvelle femme. On prétendait qu’à force d’en être fier il en était devenu amoureux. Madame de Cernan avait été désignée par l’empereur pour accompagner la reine de Naples à Braunau ; mais la maladie d’un de ses enfants l’avait retenue à Paris ; elle s’en consolait en recevant tous les jours un récit détaillé de ce qui se passait à Braunau.
On lui mandait exactement tous les débats de prééminences, les importantes puérilités de l’étiquette, les pruderies affectées pour faire illusion sur les intrigues passées et présentes, les lignes de démarcation établies entre les duchesses de la nouvelle fabrique et mesdames de Mort…, de Montra…, de Beau… et de Noa… Tous ces commérages de cour étaient d’un grand intérêt pour madame de Cernan.
— Ainsi donc, disait M. de Montvilliers, voilà presque tous les grands noms de France attachés au char du conquérant ! Si par un revers, difficile à prévoir, j’en conviens, l’ancienne dynastie revenait sur le trône, je voudrais bien savoir ce que feraient cette foule d’émigrés qui se pressent aujourd’hui sur le seuil du palais impérial.
— Ils y resteraient, répondit en riant la comtesse ; ce sera toujours leur place. Ce n’est pas notre faute si notre rang, notre éducation nous appellent à vivre dans le palais des rois ; mais tant qu’il y aura en France une noblesse et une cour, elles tendront toujours à se réunir.
— Je le pense aussi, dit le docteur en se levant, mais je ne crois pas que nous ayons jamais à en faire l’épreuve.
— Qui sait ! dit le président ; la volonté de Dieu est grande. Il y a deux choses dont on ne peut jamais répondre, de la for-