férant faire cette longue route avec elles, et ne doutant point qu’Adhémar ne fût du même avis. Il parut un moment contrarié de cette proposition ; mais, poussé par l’idée de ne pouvoir s’y refuser sans paraître étrange, il monta après lui dans la voiture et se trouva en face d’Ermance.
Après une longue hésitation et des craintes indéfinissables, elle prit enfin sur elle de lui dire d’une voix timide :
— Vous paraissez souffrant ?
— Moi, souffrant, répondit-il d’un ton amer, non, vraiment, je me sens fort bien.
— Pourtant… il me semblait… Je craignais… balbutia Ermance.
— Vous êtes trop bonne, reprit-il en cherchant à adoucir la sécheresse de son inflexion.
Puis, voulant rendre la conversation générale, il parla de la contrainte répandue sur le cercle de la Malmaison. Le général prédit que si l’impératrice ne prenait pas mieux son parti, elle ne verrait bientôt plus que les personnes attachées à sa cour.
— C’est parce qu’elle s’attend à ce prochain abandon qu’elle est si triste, dit Ermance en soupirant. Ah ! plus j’observe le monde, plus je vois qu’il faut le fuir quand on ne peut lui cacher ses peines !
— Ou ses plaisirs, dit Adhémar avec un sourire sardonique, et en lançant sur Ermance un regard accusateur.
Elle ne répliqua point. Le froid d’un coup de stylet dans le cœur l’aurait moins glacée que ce mot cruel.
— Il sait tout, pensa-t-elle ; ah ! puissé-je mourir à son premier reproche !
XXVIII
En arrivant, madame de Lorency monta chez son oncle, qu’une légère attaque de goutte retenait dans sa chambre, Adhémar l’y suivit ; mais après s’être informé affectueusement des nouvelles du président, il le laissa seul avec Ermance. Alors elle raconta ce qui s’était passé dans leur visite à la