— Qui me parle ? demande-t-elle en tremblant ; est-ce vous Ambroise ?
Mais Ambroise, le jardinier, est assis sur le banc de sa porte, à jouer avec ses enfants, et il n’entend pas Ermance.
— Qui donc est là ? dit-elle en se retournant précipitamment pour regagner l’allée qui conduit au château.
— C’est moi, madame, répond la nouvelle femme de chambre d’Ermance ; je me suis aperçue que madame avait oublié son chapeau, et comme il fait très-humide ce soir, je viens le lui apporter.
— Ah ! mon Dieu, que vous m’avez fait peur ? dit en souriant madame de Lorency ; mais il y a donc quelque temps que vous êtes là ?
— Non, madame, j’arrive à l’instant ; et sans Francisque, qui m’a dit avoir vu madame entrer dans le petit bois, j’aurais peut-être fait tout le parc avant de la rejoindre.
En parlant ainsi, mademoiselle Rosalie s’apprêtait à retourner au château : sa maîtresse la retient. Touchée d’un soin qui prouve l’intérêt et le zèle de sa femme de chambre, Ermance n’ose le lui reprocher ; mais le tremblement qu’elle conserve encore, et l’idée que la voix qu’elle avait entendue d’abord n’était pas celle de Rosalie, lui inspirent le désir de ne pas rester plus longtemps seule dans le parc ; elle s’appuie sur le bras de sa femme de chambre, puis, se tournant du côté où elle avait cru entendre parler :
— C’est étrange, dit-elle, l’imagination une fois frappée, rien ne détruit l’impression qui reste : on ne m’ôterait pas de l’idée qu’il y a là quelqu’un ; et pourtant, quand j’ai appelé, personne n’a répondu… vous seule…
— Cela ne pourrait être qu’un des gens de la maison, interrompit mademoiselle Rosalie, et certes aucun d’eux ne s’amuserait ainsi à faire peur à madame ; mais le soir, dans un jardin, si une branche se casse, si un oiseau s’envole, on croit toujours que ce sont des personnes.
— À cette heure, les grilles du parc sont fermées, n’est-ce pas ?
— Oui, madame, tous les jours, excepté celui-ci pourtant ; car M. le président devant traverser le parc en revenant de