Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/259

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aussitôt le faible cadenas de la chaîne de cheveux, la prend, et dit d’une voix altérée par la colère des mots sans suite qu’Ermance ne peut entendre, car elle a presque perdu l’usage de ses sens. M. Brenneval qui la rejoint en ce moment, la voit prête à se trouver mal. Persuadé que la chaleur qu’il fait dans cette salle la suffoque, il l’entraîne hors du bal, et la ramène chez elle dans un état d’effroi et de stupeur impossible à décrire.



XLI


M. de Montvilliers, ayant appris que sa nièce était revenue souffrante du bal masqué, se rendit dans sa chambre dès qu’elle fut visible.

— C’était lui ! s’écria Ermance en apercevant le président ; je n’en puis douter, c’était lui. Ah ! mon oncle, que va-t-il croire ?

— Qui, lui ? demanda-t-il, ne pouvant se douter de la pensée d’Ermance.

— Adhémar ! reprit-elle avec l’accent de la terreur.

— Quelle idée ! Quoi ! tu penses qu’il serait de retour ? Mais pourquoi nous en faire un mystère ?

— C’était lui, vous dis-je ; son tremblement, sa colère ne m’en laissent aucun doute.

— Non, cela est impossible. Les journaux n’auraient pas manqué de parler de son départ de Constantinople… C’est quelque mauvais plaisant qui se sera amusé à le contrefaire et à te jeter dans ce trouble. Quand on veut jouer un semblable rôle avec succès, il faut feindre la colère, la jalousie : c’est ce qu’il y a de plus facile et de plus certain.

— Eh ! quel accent emprunté, quel regard menaçant aurait pu me plonger dans l’état où je suis ? Il était là, devant moi, immobile ; il n’avait pas dit un mot, et déjà tout mon être, averti de sa présence, éprouvait un trouble, une émotion qui m’empêchaient de respirer.

Alors Ermance raconta cette singulière apparition, et la