— Je dois croire le contraire, car elle était si mal tout à l’heure qu’elle n’a pu me recevoir.
— Cela m’étonne ; elle est accoutumée à vous recevoir dans les moments où elle souffre le plus, reprit M. de Maizières avec un sourire méchant.
— Faites-moi grâce de vos réflexions piquantes, dit la duchesse avec humeur ; il y a dans tout ceci quelque chose que je ne comprends pas, et je compte sur vous pour l’éclaircir. Cette madame Donavel, avec ses façons maternelles, m’est suspecte ; je lui crois un intérêt à éloigner toutes les amies de madame de Lorency, pour se réserver à elle seule les profits d’une amitié généreuse. Depuis qu’elle s’est emparée d’Ermance, vous avez dû vous apercevoir d’un changement extrême dans les manières de madame de Lorency avec nous.
— Moi, non, reprit M. de Maizières ; je la trouve toujours aussi tolérante pour mes défauts, et il me semble qu’elle ne l’est pas moins pour vos agréments.
— Cela est fort galant, répliqua-t-elle avec ironie, mais rien n’est moins vrai. On aura fait parvenir à Ermance quelque sot bruit sur mon compte, et elle veut faire avec moi de la dignité et du ressentiment peut-être.
— Écoutez donc, dit Ferdinand, quand elle vous en voudrait un peu de votre ascendant sur son mari, ce serait fort simple.
— Et fort ridicule de sa part, interrompit Euphrasie ; son sentiment pour lui n’est pas tellement exclusif qu’elle soit en droit de se montrer jalouse.
— Ah ! voici de la méchanceté, et vous voulez qu’elle vous traite en amie ?
— Je veux qu’elle conserve avec moi les mêmes manières et l’espèce d’intimité qu’elle-même a établie entre nous : autrement je serai forcée de me justifier des motifs qu’elle donnera pour expliquer notre rupture, et, croyez-moi, ajouta la duchesse en appuyant sur ces derniers mots, cette explication ne tournera pas à son avantage…
— Ainsi, pour vous venger d’une rancune assez méritée, vous inventerez quelque atroce calomnie ! reprit M. de Maizières