Page:Nichault Les Malheurs d un amant heureux.djvu/153

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— Eh bien, soit, me dit-il, puissent ton dévouement et ta curiosité n’être pas trop punis. Tu partageras, autant qu’on voudra bien le permettre, ma bonne ou mauvaise destinée ; et, pour te mettre plus à portée de me suivre, je te donne la jument baie que Germain a montée pendant son voyage ; si mon cheval est tué sons moi, tu me la prêteras, n’est-ce pas ?

— Ah ! mon cher maître ! fut tout ce que je pus lui répondre.



XXXIII


Nos préparatifs achevés, Gustave se rendit chez madame de Verseuil ; elle était déjà entourée de tout l’état-major de son mari, et madame d’Olbiac, assise à côté d’elle, y remplissait ses fonctions de duègne de manière à ne laisser nul espoir d’approcher de sa belle-sœur, même pour lui adresser secrètement un mot. Cependant, Gustave désirait lui faire ses adieux, et la remercier des regrets qu’il lisait sur ce charmant visage, dont la pâleur et le regard languissant lui inspiraient une émotion si douce !

— Vous partez avec le général, lui dit-elle d’une voix presque éteinte, et nous allons rester ici livrées à bien des inquiétudes. M. de Verseuil a rarement le temps d’écrire ; s’il vous en restait plus qu’à lui, donnez-nous quelquefois de ses nouvelles et des vôtres. Dans les tristes moments que nous passerons ici, vos lettres nous seront d’un grand secours.

— Et à moi aussi, répondit Gustave ; car, au milieu des travaux qui vont nous occuper, je serai trop heureux d’avoir une occasion de m’en reposer en vous les racontant, madame ; et puis, ajouta-t-il en souriant, les gens polis répondent ordinairement aux lettres que l’on…

— À propos, interrompit Athénaïs, j’oubliais de vous rendre le livre que vous avez eu la bonté de me prêter à Valence.

— Quel livre, madame ?… je ne m’en souviens pas…

— Vous allez bientôt le reconnaître, j’en suis certaine ; peut-être me l’avez-vous donné avant de l’avoir lu ?