Page:Nichault Les Malheurs d un amant heureux.djvu/248

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que, Lonado étant cerné de tous côtés, il ne restait d’autre parti à prendre pour les Français que de mettre bas les armes, et de se rendre à discrétion. Le général en chef n’avait avec lui à Lonado que mille à douze cents hommes. La situation était éminemment critique et les officiers qui l’entouraient, livrés à la plus vive anxiété, attendaient immobiles la réponse qu’il allait faire. À son regard inquiet, à la manière précipitée dont il marchait à grands pas dans la chambre, on devinait facilement les craintes qui l’agitaient ; mais tout à coup son génie lui révèle que la troupe qui se présente ainsi par la route de Brescia ne peut être qu’un débris de celle qui avait été battue la veille près du lac de Garda ; et que cette colonne égarée essayait de regagner l’armée du général Wurmser en passant par Lonado. Éclairé par ces réflexions, Bonaparte s’adresse au parlementaire, et lui demande avec un mélange de colère et de dignité par quel motif il ose venir ainsi sommer un général en chef vainqueur au milieu de son quartier-général, et entouré de son armée.

— Allez, ajouta-t-il, allez dire au général qui vous a envoyé que, s’il a prétendu faire une insulte à l’armée française, je suis ici pour la venger ; qu’il est lui-même mon prisonnier, ainsi que ses soldats : je sais que sa troupe n’est qu’une des colonnes coupées par les divisions de mon armée qui occupent Salo et la route de Brescia à Trente. Dites-lui que si, dans huit minutes, il n’a pas mis bas les armes, et si une seule amorce est brûlée, je le fais fusiller lui et ses gens.

Puis, s’adressant aux officiers qui avaient amené le parlementaire :

— Qu’on enlève le bandeau qui couvre les yeux de monsieur.

Et, continuant de parler à ce dernier :

— Voyez le général Bonaparte au milieu de son état-major et de l’armée républicaine, et rapportez à votre général qu’il peut faire une bonne prise.

En reconduisant le parlementaire, Berthier reçut l’ordre de réunir, de faire passer et même repasser devant lui les grenadiers, les guides ; enfin, la petite troupe qui gardait le quartier-général. L’officier autrichien, trompé par la bonne