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LA NAUFRAGEUSE

— Mais les abords de l’île sont impraticables à ceux qui ne la connaissent pas.

— Elle lui fait des signaux avec une torche. Chaque fois, du reste, il aborde à un endroit différent. Il suit la lumière. Lorsqu’il revient, le matin, c’est moins difficile.

Adorata mordit sa bouche pulpeuse jusqu’au sang. C’est elle qui avait exigé qu’ils fissent chambre à part. Elle ne désirait pas qu’il la vit dormir. Elle voulait lutter toujours, ne jamais se montrer dans sa faiblesse.

Des larmes de rage montaient à ses yeux.

Elle s’en prit au pêcheur.

— C’est bien, partez, je n’ai plus besoin de vous !

Il salua gauchement. Il s’en voulait d’avoir tout dit. Cette femme l’emplissait d’angoisse.

— Que va-t-il se passer ? murmura-t-il.

Car il était sûr qu’il se passerait quelque chose.

Aucun pressentiment n’avait effleuré Rosie. Sa torche à la main, elle attendait Patrice. Elle s’était habituée à ce compagnon charmant et tendre. Les précautions qu’il devait prendre ajoutaient un piment à leurs rendez-vous clandestins.

Elle souriait à ses pensées quand elle fut renversée durement sur le sol. On la liait sauvagement, on la bâillonnait aussi.

Et elle vit, à la lueur de la torche, le sombre visage d’Adorata.

La femme de Patrice monta dans une barque, la torche fut fixée sur l’avant de l’embarcation.

On entendait le bruit d’un nageur fendant l’eau. Adorata resta immobile un moment, puis se mit à ramer.

Et l’homme suivait la lumière fuyante qui devait le conduire à l’amour, mais qui le menait à la mort.

Il ne comprit pas tout de suite, s’étonna de la voir s’éloigner à mesure qu’il approchait.