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ON NE DOMPTE PAS L’AMOUR

Catherine songeait :

Comment avait-elle pu l’épouser, elle, la petite fille bourgeoise que rien ne semblait pousser vers une existence nomade et ardente ? Ce n’était pas l’amour seul qui l’avait jetée vers Marco. Il y avait les bêtes, les tigres et les lions qui vivaient avec lui et qu’il dominait. Et c’étaient ces animaux qui l’avaient attirée, conquise.

Il y avait en Marco quelque chose de violent, de magnétique. Les bêtes obéissaient. Elle fit comme elles. Et ce fut infiniment doux.

Marco l’aimait. Ils voyagèrent. Chaque jour, elle entrait dans la cage. Les fauves, les lourdes bêtes privées de liberté, de soleil et d’espace, lui étaient proches. Elle aussi était captive.

Puis, après six mois d’un travail intensif, elle parut devant le public, mince et dure sous son dolman couleur d’argent. Et ce fut du délire.

Marco, ce soir-là, l’aima plus encore.

Il y avait trente jours de cela. Trente jours lourds de maléfices encore imprécis.

Il faisait tout à fait sombre dans la roulotte, les heures fuyaient, impalpables, tandis que Catherine, étendue sur le divan, évoquait ce proche passé.

Tout à coup, une grande ombre se pencha sur elle. Les mains de Marco atteignirent son visage et le sculptèrent tendrement.

Elle le laissa faire, heureuse, ne pensant à rien.

Soudain, elle sentit que la voiture s’arrêtait. Elle s’échappa des bras de son mari.

Il fallait qu’elle voie Aziza, sa belle favorite. La tigresse supportait mal les voyages, et Catherine avait pris l’habitude de l’apaiser.

Sans plus s’occuper de Marco, elle courut vers le fourgon des fauves. Elle s’était attachée à la tigresse capricieuse et nostalgique, aux pattes caressantes et brutales.

Sans crainte, elle posa ses mains sur les barreaux et