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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

— Je ne dis pas. Mais comme j’aime mieux vos robes de scène, celle-là surtout, la verte aux reflets d’argent.

— Elle est bien indiscrète.

— C’est peut-être pour cela que je l’aime.

Ruby dégagea son bras, regarda l’heure à sa montre-bracelet.

— Il serait temps de dîner, dit l’homme. Vous avez une idée ?

— Vous tenez à dîner, fit Ruby ?

— Vous m’aviez promis.

— Oui, mais il est sept heures. Je dois être au Casino à neuf heures. Nous aurions peu de temps. Et puis je n’aime guère manger avant de danser.

— Alors, vous me laissez tomber ?

— Soupons ensemble après le spectacle.

— Comme cela, ça va… Vous prendrez tout de même bien un cocktail ?

― Avec plaisir.

Pendant qu’ils remontaient la rue de Clichy, la nuit était devenue presque complète. Les enseignes au néon dessinaient des cabrioles rougeâtres sur les maisons grises, mais ce n’était encore que de pauvres farces auprès des facéties et des folies que la lumière réservait pour le véritable Montmartre, un peu plus haut, de la place Blanche à la place Pigalle. La rue de Clichy est une parente pauvre dans l’exubérance déchaînée du Montmartre nocturne.