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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

marché. L’orchestre jouait la rengaine lente qui accompagnait les exercices aériens des Campellini.

 

Devant la petite porte interdite au public, un grand garçon brun, sportif, vêtu avec goût, faisait les cent pas avec impatience. Dès qu’il vit Ruby, il s’empressa à sa rencontre.

— Enfin, dit-il, comme le temps m’a semblé long.

— Vous avez donc si faim, se moqua-t-elle.

— Non. Mais j’avais envie de vous voir.

— Ne m’avez-vous assez vue ? Vous étiez dans la salle aujourd’hui, et je tiens le plateau pendant au moins trente minutes.

— Mais ce n’est pas du tout la même chose. Sur la scène, c’est vous et ce n’est pas vous. Je ne peux pas dire que je n’aime pas vous voir danser, mais combien je préfère vous voir près de moi, telle que vous êtes en réalité. Vous êtes si jolie, si jeune.

— C’est vrai ce que vous dites là ?

— Si ce n’était pas vrai, perdrais-je mon temps à vous attendre dans la rue.

Tout en marchant près d’elle, il l’examinait.

Ruby finit par lui demander :

— Qu’avez-vous à me regarder comme cela ? Il y a quelque chose qui ne vous plaît pas ?

— Je n’aime pas votre robe.

— Tant pis. Moi, je lui trouve assez d’allure. Le jeune homme lui prit familièrement le bras.