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viii
PRÉFACE

ne sollicitait qu’un délai de quarante jours, ordre fut donné à Nézam-el-Moulk de mettre immédiatement à sa disposition les archives des finances, les moustofis (écrivains du Divan) et tout le personnel de la direction des fonds. Hassan, ravi de se trouver ainsi tout à coup à la tête de la branche la plus importante de l’administration, considérait déjà la ruine complète de Nézam-el-Moulk comme assurée. Celui-ci, de son côté, s’aperçut, mais un peu tard, de l’imprudence qu’il avait commise en plaçant si haut un homme qu’il aurait dû si bien connaître et dont il eût fallu se défier. Cependant il ne désespéra pas de déjouer, en employant ruse contre ruse, les projets déjà si avancés de son ambitieux antagoniste. Sachant par expérience combien les hommes de son temps étaient corruptibles, connaissant en outre l’avidité proverbiale et la faiblesse de caractère du confident de Hassan-Sèbbah auquel celui-ci avait cru pouvoir confier la direction du travail qu’il avait entrepris sur l’ordre d’Alp-Arslan, il n’hésita pas à fournir à un de ses favoris, sur la fidélité duquel il savait pouvoir compter, des sommes assez irrésistibles pour amener à bonne fin le plan qu’il avait conçu.

Le favori du ministre, homme sûr et habitué à ces sortes de services, employa si habilement cet argent qu’il ne tarda pas à s’attirer les bonnes grâces du faible et intéressé confident de Hassan, et se vit ainsi à même de fournir à son maître tous les renseignements que celui-ci attendait avec impatience et dont il devait profiter lorsque le moment serait venu. Ce moment, c’était l’expiration du délai de quarante jours qu’avait demandé Hassan-Sèbbah. Au jour fixé tout était prêt ; Hassan semblait triompher ; mais Nézam-el-Moulk, ce jour-là même où le volumineux mémoire de son adversaire devait