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PRÉFACE

de son confident. Au premier appel, Hassan cherche, mais en vain, le feuillet demandé. Il pressent une trahison, il se trouble ; et la rumeur que cet incident provoque dans la salle, la présence du roi, irrité de trouver un tel désordre dans un mémoire de cette importance, ajoutent à la confusion de Hassan, qui se voit bientôt forcé de se retirer, après une sévère réprimande de la part d’Alp-Arslan. Nézam-el-Moulk était vengé ; il s’approcha respectueusement du roi et lui fit observer qu’il était difficile d’exiger plus de régularité dans un travail sérieux, fait à la hâte par des gens incapables. Après cet échec, Hassan ne reparut plus à la cour. L’histoire nous apprend qu’il alla voyager en Syrie, où il adopta les dogmes de la secte ismaélite, dogmes qu’il résolut d’importer en Perse, en y ajoutant d’autres nouveautés plus conformes aux opinions des soufis[1], alors très-nombreux dans le royaume, dans le but de s’en faire une arme et de devenir ainsi la terreur de ses ennemis. Il revint en effet en Perse, mais en se cachant soigneusement, pour se dérober aux recherches de Nézam-el-Moulk, dont il redoutait le ressentiment. Il se rendit à sa ville natale de Rhèi[2], après avoir vécu quelque temps à Ispahan, où, enhardi par la facilité avec laquelle s’opérait le recrutement projeté de ses néophytes, il ne forma rien moins que le projet de faire trembler sur son trône le souverain lui-même. A Rhèi il appela près de lui quelques mé-

  1. Les partisans de cette secte, encore très-nombreux aujourd’hui dans presque toute l’Asie, croient que, sans rejeter le Koran, on ne doit pas en suivre la lettre, mais bien l’esprit. Ils repoussent les formes extérieures de la religion musulmane comme entièrement indifférentes au grand Tout, qui est la Divinité, et veulent qu’on offre au Créateur cette adoration fervente et secrète qui réside dans l’âme.
  2. Ragès des anciens.