nous trouverons, là aussi, que l’obéissance sans
conditions est plus aisée que l’obéissance conditionnelle. Le saint se facilite donc la vie par cet
abandon total de sa personnalité, et l’on s’abuse
quand on admire dans ce phénomène le suprême
héroïsme de la moralité. Il est dans tous les cas
plus pénible de maintenir sa personnalité sans
incertitude ni injustice, que de s’en séparer de la
façon qu’on vient de dire ; outre qu’il y faut bien
plus d’esprit et de réflexion.
Après avoir, dans beaucoup des actions les plus difficilement explicables des manifestations de ce plaisir de l’émotion en soi, je pourrais aussi reconnaître dans le mépris de soi-même, qui fait partie des caractères de la sainteté, et de même dans les actes de torture de soi-même (par la faim et les flagellations, les dislocations des membres, la simulation de l’égarement) un moyen par lequel ces natures luttent contre la lassitude générale de leur volonté de vivre (de leurs nerfs) : ils ont recours aux moyens d’excitation et de torture les plus douloureux pour se relever, au moins pour quelque temps, de cet affaissement et de cet ennui où leur grande indolence d’esprit et cette soumission à une volonté étrangère que nous avons décrite les fait si souvent tomber.