ceux-ci, par leur absolue soumission aux grands
esprits, assurent à leurs propres esprits, pour le
temps du développement, la discipline et l’école la
meilleure. Au contraire, il y a lieu au moins de se
demander si la superstition du génie, de ses privilèges
et de ses facultés spéciales est d’utilité pour
le génie lui-même, lorsqu’elle s’enracine chez lui.
C’est en tout cas un symptôme dangereux quand
l’homme est près de cette crainte religieuse de lui-même,
qu’il s’agisse de cette célèbre crainte des
Césars ou de la crainte du génie considérée ici ;
quand l’odeur des sacrifices que l’on n’offre équitablement
qu’à un dieu pénètre dans le cerveau du
génie, au point qu’il commence à chanceler et à se
tenir pour quelque chose de surnaturel. Les conséquences
sont à la longue : le sentiment de l’irresponsabilité,
des privilèges exceptionnels, la persuasion
qu’il fait une grâce rien que par son commerce,
une folle rage à propos de toute tentative
de le comparer à d’autres ou de le taxer même plus
bas, de mettre en lumière ce qu’il y a de manqué
dans son œuvre. Par cela même qu’il cesse d’exercer
une critique contre lui-même, les pennes finissent
par tomber de son plumage une à une ; cette
superstition mine les racines de sa force et fera
peut-être même de lui un hypocrite, après que sa
force l’aura quitté. Même pour de grands esprits,
il y a vraisemblablement plus d’utilité à se rendre
compte de leur force et de son origine, à com-
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HUMAIN, TROP HUMAIN