une école aussi importante que celle du contrepoint
et de la fugue dans le développement de la musique
moderne ou que les figures à la Gorgias dans
l’éloquence grecque. Se donner ainsi des liens peut
paraître absurde ; néanmoins il n’y a pas d’autre
moyen, pour sortir du naturalisme, que de commencer
par se limiter de la façon la plus forte
(peut-être la plus arbitraire). On apprend ainsi peu
à peu à marcher avec grâce même dans les sentiers
étroits qui passent comme des ponts au-dessus
d’effrayants précipices, et l’on remporte comme
butin la plus extrême souplesse de mouvement :
c’est ce que l’histoire de la musique prouve aux
yeux de tout homme vivant actuellement. C’est là
que l’on voit comment pas à pas les liens deviennent
plus lâches, jusqu’à ce qu’enfin ils peuvent
paraître être rejetés tout à fait : cette apparence
est le résultat suprême d’une évolution nécessaire
dans l’art. Dans la poésie moderne, il n’y eut pas
un si heureux affranchissement graduel des liens
imposés par soi-même. Lessing tourna la forme
française, c’est-à-dire l’unique forme d’art moderne,
en dérision dans l’Allemagne et renvoya à
Shakespeare ; et ainsi l’on perdit la continuité de
cet affranchissement et l’on fit un saut en arrière
dans le naturalisme — autrement dit dans les commencements
de l’art. Gœthe cherche à s’en échapper
en s’ingéniant sans cesse à se redonner des
liens de diverses sortes ; mais même le mieux doué
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HUMAIN, TROP HUMAIN