Art et restauration. — Les monuments rétrogrades
dans l’histoire, ce que l’on appelle les époques
de restauration, qui cherchent à faire renaître
un état intellectuel et spcial qui existait avant
celui qui subsistait en dernier lieu et à qui une
courte résurrection semble vraiment réussir, possèdent
le charme que suscitent les souvenirs pleins
de sentiments, le désir ardent de ce qui est presque
perdu, le hâtif embrassement d’un court bonheur.
À cause de ce singulier approfondissement
de l’esprit, les arts et les lettres trouvent un sol
propice justement à ces époques fugitives, presque
enveloppées de rêve : de même que les plantes les
plus tendres et les plus rares croissent sur les versants
abrupts des montagnes. — C’est ainsi que
maint bon artiste est poussé imperceptiblement à
des idées de restauration politique et sociale, en
vue de quoi il s’arrange à son propre gré, une petite
retraite fleurie et silencieuse : où il réunirait autour
de lui les vestiges humains de cette époque de l’histoire
qui lui rappelle ce qu’il aime, exerçant son
archet devant des morts, des mourants et des épuisés,
avec, peut-être, le succès d’une brève résurrection.
Bonheur de l’époque. — Notre époque doit s’estimer heureuse pour deux raisons. Par rapport au passé nous jouissons de toutes les cultures et de leurs productions, et nous nous nourrissons du sang le plus