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OPINIONS ET SENTENCES MÊLÉES

que quelqu’un s’arrête immédialement avant d’avoir trouvé la solution, persuadé que, jusqu’ici, tous ses efforts ont été vains, — semblable à quelqu’un qui désembrouille un écheveau et qui hésite, au moment où il est presque défait, car c’est alors qu’il voit le plus de nœuds.

204.

Se joindre aux exaltés. — L’homme réfléchi et sûr de sa raison peut gagner à se mêler pendant dix ans aux Imaginatifs, s’abandonnant dans cette zone torride à une douce folie. Cette fréquentation lui a fait faire beaucoup de chemin pour le faire aboutir enfin à ce cosmopolitisme de l’esprit qui peut dire sans présomption : « Rien d’intellectuel ne m’est étranger. »

205.

Air vif. — Ce qu’il y a de meilleur et de plus sain dans les sciences comme dans les montagnes, c’est l’air vif qui y souffle. — Ceux qui aiment la mollesse de l’esprit (les artistes, par exemple) craignent et abandonnent les sciences à cause de cette atmosphère.

206.

Pourquoi les savants sont plus mobiles que les artistes. — La science a besoin de natures plus nobles que la poésie. Les natures scientifiques doivent être plus simples, moins portées sur la gloire, elles doivent approfondir des choses qui, aux yeux du grand nombre, paraissent rarement dignes d’un